PHILIPPE MURER*
Alors que l’économie mondiale s’enfonce dans une crise de la demande de plus en plus forte, les bourses s’envolent.
Bien que les journaux en parlent peu, la croissance dans les grands pays émergents est de plus en plus faible :
. Croissance d’à peine 1% au Brésil
. Croissance de 3% mais en fort ralentissement en Russie
. Croissance de 4,5% en Inde contre 8% dans les années 2000
. Croissance de 2% en Corée du Sud, de 1% à Taïwan et nulle à Hong Kong
. Croissance réelle autour de 5% en Chine si l’on extrapole la croissance de la consommation de matières premières par la Chine (les chiffres ne sont plus cohérents et même Goldman Sachs et UBS s’en étonnent dans cet article).
Si certains des lecteurs peuvent rêver d’une telle croissance en France, n’oublions pas que ces pays ont un grand retard économique à rattraper.
L’Europe est en moyenne en récession de 1% .
Les Etats-Unis sont le seul pays qui continue à avoir une croissance en adéquation relative avec son potentiel autour de 2% sur l’année écoulée. Mais ceci est dû à une spécificité américaine : le crédit à la consommation. En effet, le salaire moyen n’augmente pas ou très peu comme on le voit sur ce graphique : à peine 0,3% chaque année (chiffre du bureau pour l’emploi américain BLS).
Mais le crédit à la consommation a une toute autre dynamique ! A l’exception de la crise de 2008, sa hausse génère directement 1% de croissance par an (sans compter les effets indirects)
Grâce au crédit, les américains génèrent donc un peu de croissance économique malgré la faiblesse des salaires. On rappelle ici la règle économique de base qu’on a un peu tendance à oublier : sans hausse des salaires, pas de croissance économique viable ! N’est-ce pas Messieurs les économistes « il faut baisser les coûts du travail »
Evidemment, cette hausse du crédiot a l’inconvénient de faire baisser le taux d’épargne à des niveaux proches de 0 comme en 2007-2008 mais cela compense la faible hausse des salaires.
On peut ainsi représenter le changement des rythmes de croissance de l’économie mondiale ainsi
Une autre preuve de cette faiblesse de la croissance mondiale est la faiblesse des cours des matières premières.
Graphique de l’indice CRB des matières premières
Et pourtant elles montent !
Malgré cette faiblesse de l’économie mondiale, les marchés d’actions s’envolent aux USA et grimpent en Europe ou la récession fait rage.
Le découplage est de plus en plus important entre l’économie réelle et « l’économie virtuelle ». La cause en est simple :
. l’austérité règne dans l’économie réelle ; les hausses d’impôts, les coupes dans les budgets et la faiblesse de la hausse des salaires la saigne.
. l’enthousiasme règne dans l’économie virtuelle grâce à la hausse des résultats (faibles coûts salariaux !) mais surtout grâce aux immenses quantités d’argent déversées par les Banques Centrales dans les Marchés Financiers : 1000 Milliards prêtées aux banques européennes à un taux dérisoire sur 3 ans, plus de 1000 Milliards de Dollars d’actifs achetés chaque année dans les marchés financiers par la Banque Centrale américaine et plus de 500 Milliards de Dollars d’actifs achetés chaque année par la Banque Centrale japonaise. Il est même fort possible qu’une nouvelle bulle des bourses soit en train de gonfler.
Prendre aux pauvres tout en donnant aux riches : le système tourne sur la tête !
C’est pour cela que nous devons inventer un autre système, remettre l’Etat au centre du jeu économique en lui redonnant la main sur la Banque Centrale pour que la création de Monnaie serve à financer des projets dans l’économie réelle, des projets utiles, rentables (transition vers les énergies renouvelables, ferroutage, voitures électriques ou à hydrogène …) qui irrigue toute l’économie et non déverser de façon stupide des tombereaux d’argent sur les Marchés Financiers, alimentant ainsi la hausse des plus grandes fortunes. Nous l’avons fait dans les années 45-80 avec le programme nucléaire, le programme de canalisations d’eau potable et d’eaux usées et le programme d’installations de lignes téléphoniques pour tous. Il faut recommencer avec les infrastructures de l’avenir en prenant en compte les contraintes de respect de l’environnement et de finitude des ressources naturelles (transition énergétique, recyclage, écoconception…).
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