Un appel pour gagner à gauche
Nous sommes une majorité écrasante contre la loi El Khomri. 71 % des Français. Des millions de manifestants en 6 reprises depuis deux mois. Un million et demi de pétitionnaires, la jeunesse entière, 80 % du mouvement syndical : CGT, FO, FSU, Solidaires, mais aussi des secteurs de la CFDT, de la CFTC, de la CGC et de l'UNSA. Près de 500 conflits sociaux éclatent sur tout le territoire. Le mouvement social est profond, installé et n'a aucune raison de s'arrêter. Les places de nos villes sont occupées, des entreprises commencent à l'être comme l'ont fait les intermittents du spectacle, les premiers victorieux. 80 % de toute la gauche est insurgée, y compris une majorité du Parti socialiste, évidemment éclaté sur ce sujet comme il l'était contre la déchéance de la nationalité auparavant.
Nul ne demandait cette casse maudite d'un siècle de droits du travail, excepté le Medef, et quelques libéraux intégristes excités – malheureusement ministres. Il serait sage pour le gouvernement d'écouter avant qu'il ne soit trop tard, et de retirer ce projet scélérat dont le pays ne veut pas. Même Chirac, il y a dix ans, sut retirer le CPE après l'avoir pourtant fait adopter par un 49 3. Et là, casser 100 ans de progrès des droits des salariés, pour plaire à la seule finance, est totalement intolérable : nous voulons soumettre le bon fonctionnement des entreprises aux droits des femmes et des hommes qui y travaillent, et non soumettre les droits des salarié-e-s aux exigences des entreprises.
L'amender n'a déjà plus de signification : le Medef et la droite ont beau jouer la comédie, feindre qu'il soit dénaturé, vidé de son contenu, cela ne trompe personne, le texte est définitivement pervers, dangereux, n'accumule que des hypocrisies et des ennemis. Il n'a pas non plus de majorité parlementaire.
Le gouvernement Hollande, Valls, Macron, doit donc renoncer le plus vite possible à se fourvoyer davantage dans une rigidité suicidaire.
C'est un très grand danger d'ajouter aux rancœurs à la fin d'un quinquennat où tout aura été donné à l'oligarchie, aux dividendes et au patronat. 41 milliards ont été arrachés à nos biens publics pour être donnés sans contrepartie aux finances privées, lesquelles se sont empressées de spéculer au Panama et de ne créer aucun emploi. Un bilan désastreux avec 6,125 millions de chômeurs, 1,3 million de plus qu'en mai juin 2012 et même la « dette » s'est aggravée de 14 points par rapport au PIB.
Dans notre pays, des millions de militants, d'électeurs de gauche comprennent et refusent de suivre ce désastre jusqu'au bout. D'où l'actuelle explosion sociale. La majorité de gauche du pays cherche sa voie. C'est le retour du balancier en faveur des 99 % contre les 1 % de l'oligarchie. « Vous avez les milliards, nous sommes des millions » tel est le cri lucide de la place de la République où convergent les luttes, avec les syndicats et 20 organisations de jeunesse.
La compromission des principaux responsables de ce désastreux quinquennat, François Hollande, Manuel Valls, Emmanuel Macron, les disqualifient. A travers le mouvement anti loi El Khomri, partout dans le pays, il y a recherche d'un débouché politique victorieux qui puisse donner confiance pour la suite.
Elaborer une nouvelle plateforme
pour rassembler à gauche
pour rassembler à gauche
Cela passe par la résurgence, le rassemblement de toute la gauche, pour recréer une nouvelle plateforme commune, remobiliser des millions de militants et d'électeurs. C'est le sens de l'appel ci- dessous, que nous avons contribué à initier et que nous signons et diffusons massivement.
C'est le premier pas d'une plateforme qui est en gestation et qui devra être massivement soumise a discussion auprès de millions de salariés et citoyens en vue des primaires qui doivent se tenir les 4 et 11 décembre prochains. Ces primaires, à partir de cette plateforme, devraient permettre de désigner un candidat unique aux présidentielles telles qu'elles sont programmées en avril et mai 2017.
Nous avons l'ambition de construire un vaste projet collectif participatif de toute la gauche.
Car nous savons sans conteste, que s'il y a plusieurs candidats de gauche ce sera le désastre, aucun n'atteindra le deuxième tour de la présidentielle, et le choix sera comme en 2002, entre droite et extrême droite. Certains calculent déjà en se délectant : il ne resterait plus, en juin 2017 qu'à peine 25 députés socialistes, zéro FdG et zéro EELV. C'est vraisemblable hélas. Quels que soient les scores des uns et des autres, rien n'aura plus d'importance, ce sera un suicide collectif. Ce serait alors menaçant et contradictoire avec le retour de balancier à gauche que nous sommes en train de vivre dans le mouvement social. Contradictoire avec la victoire contre la loi El Khomri pour laquelle nous travaillons si fort.
Il faut faire table rase de toutes les divisions actuelles et bâtir un cadre commun : une plateforme de gouvernement positive et simple pour les cinq ans à venir de 2017 à 2022 et il faut proposer à notre peuple de réaliser enfin ce qu'il attendait, tout ce qui n'a pas été fait depuis 2012. C'est possible (comme au Portugal) , on le sent, on le sait, on le peut, en définissant en commun une douzaine de mesures stratégiques, transformatrices au plan social, permettant de résolument redistribuer les richesses d'abord, et de relancer le pays en avant.
Mais nulle sensibilité à gauche ne s'imposera à une autre, nul n'imposera une candidature aux autres. Pas de diktat. Pas de candidat « naturel ». Pas de candidat autoproclamé. Sinon c'est la division et la fin.
Un grand débat citoyen
C'est pour cela qu'il faut un débat citoyen général, un formidable brassage des idées, et un libre et collectif choix de la candidate ou du candidat pour 2017.
L'histoire ne se répète pas, elle apprendra puissamment des primaires précédentes. Les électeurs des primaires 2016, l'actuelle majorité anti loi El Khomri, sauront chercher et trouver un porte-parole de confiance, correspondant au cœur de la gauche. Ayons confiance ! La gauche c'est nous tous et toutes elle sera au rendez-vous, forte, belle, déterminée. De toute façon, tout dépend d'elle. Le ou la candidat choisie sera transformée, charismatique et rassembleur (euse) , et donc, en position de gagner s'il ou elle a suivi ce parcours de discussion et de vote collectif, démocratique. Pas de sauveur suprême mais une construction collective de masse, avec 3 ou 4 millions de participants aux primaires : nous n'aimons pas la présidentielle, ni la personnalisation, mais c'est le seul et meilleur moyen d'en neutraliser les risques et de se doter d'une dynamique victorieuse pour l'emporter au deuxième tour.
Gérard Filoche